Quand l'Europe se réveille

Le 18/03/2022 0

Dans Crise démocratique

L'Europe est-elle en train de se réveiller ?

La guerre russo-ukrainienne vient-elle ruiner ou accélérer son unification ?

L'europe sur l'échiquier planétaire

Entre homogénéité et nationalismes, une laborieuse unification

Par le passé, l'unité de l'Europe a bénéficié de ciments solides. Ces derniers avaient la particularité de résulter de conjonctures qui emportaient le destin des Européens plus qu'ils n'étaient le résultat de stratégies politiques. Il en fut ainsi quand la chrétienté recouvrit l'étendue géographique de ce continent. Un phénomène qui s'est amorcé à la faveur de l'effondrement romain et qui a duré tout au long du Moyen-Age. Le vocable "Europe" n'apparaît vraiment que lorsqu'à son tour l'empire de la foi se fissure sous les coups de butoir de l'humanisme renaissant. Il rayonne avec l'Europe des lettres, qui répand ses lumières au XVIIIè siècle d'un bord à l'autre du continent. C'est l'époque où une grande impératrice comme Catherine II de Russie fait l'acquisition de la bibliothèque du philosophe Diderot. Tant désirée par les Encyclopédistes, la Révolution française viendra faire événement en posant le peuple comme détenteur du droit à disposer de lui-même : de quoi inspirer les vigoureux nationalismes qui précipiteront l'effondrement de l'Europe napoléonienne.

On sait le rôle décisif du nationalisme dans le déclenchement historique de guerres qui ont pris une ampleur  internationale. C'est le cas en 1914, puis en 1939. Au sortir de la seconde guerre mondiale, les Etats européens, exsangues et traumatisés, prennent pour objectif d'élaborer entre eux les modalités d'une unification. Ils viseront une unité militairement sécurisante et économiquement prospère. A la Guerre Froide qui sert de toile de fond à ces démarches, succède l'effondrement de l'ex-Urss, à la faveur duquel de nouveaux pays demandent à intégrer l'union européenne. Grasse et pacifiée au point de regarder la menace nucléaire comme un fantôme inoffensif et la famine comme un trauma de sa préhistoire, l'Europe se laisse bercer par des décennies de répit. De quoi s'engourdir dans une semi-léthargie, dont les bombardements en Ukraine, après les ruptures d'approvisionnement causées par la pandémie viennent coup par coup de la réveiller.

Un réveil européen qui se hisse à la hauteur du défi de la mondialisation

On aurait pu craindre qu'elle ne s'effondre, tel un colosse endormi sur son grenier. On la voit se redresser bien au contraire, et elle fait vaillamment face. D'abord elle se tient droite dans ses bottes - même s'il faut tout réarmer, ce à quoi s'attèle l'Allemagne dès les premiers jours de la crise mondiale. Ensuite elle serre les coudes avec ses réfugiés - de coeur sinon  de droit. Ainsi  les Ukrainiens qui fuient leur pays à feu et à sang, n'étant pas membres de l'Europe sur le plan institutionnel, sont accueillis à bras ouverts par nos familles ces jours-ci et une journaliste devenue célèbre en quelques heures par son exploit dissident en Russie peut compter sur l'asile français, soutenue par l'actuel président de l'Union européenne. Il est aussi remarquable de voir avec quelle énergie l'Europe s'organise pour se préparer à la pénurie céréalière à venir qui va affamer les populations dans le monde entier. On débat en ce moment-même, à la faveur de la crise internationale déclenchée par la guerre russo-ukrainienne mais aussi en tirant des leçons de la pandémie, des conditions dans lesquelles travailler à une meilleure indépendance énergétique de nos Etats et pour leur éviter de se retrouver démunis quand un pays asiatique ou autre gros producteur n'exporte soudain plus son blé ou ses semi-conducteurs. Un sursaut qui manifeste la volonté européenne de se confronter au défi consistant à concilier mondialisation et souveraineté. C'est donc notre XXIè siècle qui verra l'Europe se positionner à ce délicat sujet, moins par élan spontané certes que par la force des choses. Convoquée par l'Histoire, elle répond néanmoins par un vif engagement, et dans la cohésion ; un positionnement raisonné dont il n'est pas infondé d'espérer voir sortir quelque ordre lui assurant équilibre et puissance sur l'échiquier planétaire.

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