Quand le peuple refuse sa voix au vote
- Le 19/02/2022
- Dans Crise démocratique
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Quand l'électorat désinvestit le projet démocratique classique tel que l'incarne l'institution du vote.
Analyse d'une mutation d'un certain engagement civique.
Qui estime que voter ne sert à rien, ne s'en donnera pas la peine.On s'abstient souvent en raison d'un désintérêt spontané pour la politique mais pas seulement, ce peut être aussi à cause d'un retrait consécutif à une forte désillusion : ne plus y croire, c'est dans ce cas y avoir cru et s'être retrouvé assez déçu pour retirer sa confiance. Sans doute les récurrents scandales salissant l'image de la politique y sont-ils pour quelque chose. Le souvenir d'élections présidentielles entachées par des scandales reste frais dans les mémoires et rend les citoyens méfiants.
Au-delà de ces motifs d'ordre événementiel, un effondrement a lieu qu'il importe de prendre en compte. Celui-ci concerne les idéologies à l'heure de la crise de sens qui engloutit la civilisation occidentale, doublée d'une crise de la représentation qui précipite une désaffection de l'ancrage qui faisait jadis de chacun un membre de la cité prise au sens antique du terme. Il convoque donc d'urgence les gouvernants sur la question de conscience de leur vocation tout en interrogeant la notion de "peuple" et de son actualisation sur fond d'intérêts privés.

Alors, s'est-on définitivement éloigné, en ce début de XXIè siècle de l'animal politique par lequel Aristote définissait l'Homme ? J'évoquais déjà en juin dernier les axes d'une problématique que soulevait l'absentionnisme massif des Français aux élections, et sans doute la crise démocratique déborde-t-elle l'hexagone. Que veut le peuple ? Que veut le politique ? Sur quelles priorités se séparent-ils ? Sur quelles valeurs se retrouvent-t-ils ? Et comment désormais restaurer entre eux un débat constructif ? Il est symptomatique que ce dernier vire trop souvent au dialogue de sourds, tels ceux que condamne une sorte d'incompréhension de classe. Le peuple quant à lui n'attend plus le politique.
On remarquera en effet que, loin de se désintéresser de leur sort, les gouvernés qui boudent l'urne s'orientent désormais vers d'autres moyens d'expression politique que le sacro-saint vote du dimanche printanier. Quand ils se détournent de ce geste aujourd'hui démythifié, c'est parfois pour lui préférer des "prises de parole" autrement activistes de type marche pour le climat, consultation citoyenne, etc. Une façon d'exercer un engagement qui ne cesse donc pas, quant à lui, de faire sens. Au politique d'y répondre. Mais bien souvent il est à la traîne du peuple dont le langage, dont le désir, dont le vécu lui demeurent étrangers. Qui vivra verra. On a la démocratie qu'on mérite.
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